De la double négation et de la suggestion que cela implique

« Je ne tolérerai pas ce que vous ne m'avez pas dit. » Heu, au fait, ça veut dire quoi ? Si je fonctionne comme plus de la moitié (1) des locuteurs francophones, je vais commencer par tenter de mettre la phrase à l'affirmatif, puis de nier cette version, puis de la nier une seconde fois... Il se passe quoi alors dans notre tête ?

Je tolérerai ce que vous allez dire, à nier deux fois
Je tolérerai ce que vous ne m'avez pas dit, à nier une fois, ou
Je ne tolérerai pas ce que vous m'avez dit, à nier une fois avant d'arriver à cette sacrée double négation

Mais, du coup, j'ai implicitement supposé que j'allais dire quelque chose, et que vous auriez pu le tolérer. Ou que vous ne l'auriez pas toléré, d'ailleurs.

Un autre exemple :
« Les voitures qui n'ont pas été incendiées n'ont pas été approchées par la racaille ». Voyez-vous l'habileté dialectique et la malhonnêteté intellectuelle sous-jacentes? On laisse sous-entendre que la racaille a incendié des voitures et n'a fait que ça. Que la racaille ne peut pas approcher d'une voiture sans l'incendier..

Alors que d'un point de vue logique pur, la première phrase serait équivalente à « vous avez dit ce que je tolère » et la seconde à « la racaille a approché des voitures incendiées », ces deux propositions étant affirmatives, elles sont beaucoup moins manipulatrice, mais... perdent de leur intérêt dialectique.

(1)Souvenez vous du petit jeu : « Ne pensez pas à un éléphant ! » Plus de la moitié des interlocuteurs pensent d'abord à un éléphant avant d'essayer de penser à autre chose, par exemple une souris, pour effacer l'éléphant de leur imaginaire...
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